Voici un article très intéressant, réalisé par Machin54 du forum, sur les paramètres de l’eau et le rapport entre le pH, l’oxygène, la photosynthèse… Je le remercie pour sa participation.
Bonjour à vous, amateurs de bassins d’ornement et autres aquariophiles convaincus. Depuis mon entrée dans Passion Bassin, j’ai remarqué que de nombreux topics dans la rubrique qualité de l’eau témoignaient d’une certaine inquiétude des possesseurs de bassins quant aux dépassements de certains paramètres par rapport aux valeurs seuils habituellement retenues.
Retour sur l’eau : les qualités et caractéristiques de l’eau, biologie, physique, chimique.
Test : mesure du pH pendant 24h
Cette inquiétude transparaît notamment sur la mesure du pH (potentiel Hydrogène), qui est souvent beaucoup plus élevée que les valeurs préconisées habituellement.
Le but de ce petit article est d’essayer d’extraire à partir de mesures faites en continu pendant 24 heures sur le pH et l’oxygène dissout dans notre bassin quelques lignes directrices permettant de comprendre une infime partie des mécanismes biologiques et physico-chimiques se déroulant dans un bassin vivant.
Le matériel : Pour ce faire, j’ai utilisé mon matériel professionnel, c’est-à-dire :
- Un pH mètre de marque WTW ion 340 avec acquisition de données. Le pas d’acquisition a été fixé a une mesure toutes les 5 minutes, pour la clarté des courbes, les valeurs ont été lissées. Ce pHmètre est à compensation de température, c’est-à-dire qu’il donne la valeur de pH corrigée pour une température de 25 °C. Cet appareil a également permis de mesurer la température en continu.
- Un oxymètre Martec relié à un appareil d’acquisition de données de marque JUMO dont le pas d’acquisition a été fixé à une mesure toutes les minutes.
Choix de la période de mesures : La mesure a été effectuée vendredi 20 et samedi 21 avril 2007, en raison d’un soleil radieux permettant une illustration plus marquée du phénomène de photosynthèse.
Caractéristiques du bassin
Notre bassin présente une surface de 6 m2 pour un volume de 3m3 et par voie de conséquence, une hauteur d’eau de 50 cm. Il est exposé au soleil. Le bassin est dépourvu d’algues microscopiques en raison de l’action de l’UV à l’amont. Toutefois un léger voile vert se forme après le passage du soleil au zénith. Dernier nourrissage 18h00 le vendredi.
Les résultats
L’oxygène dissout :
Petit rappel théorique : L’oxygène dissout dans l’eau mesuré par l’appareil est l’oxygène inutilisé par la biomasse. Cette valeur absolue (en mg/l) a été ramenée en pourcentage à la valeur théorique de saturation dans l’eau pour permettre de faire apparaître la consommation d’oxygène par les organismes vivants.
Explication : La teneur maximale en gaz dissout dans l’eau est fonction de la température (loi de Dalton) plus la température est élevée et moins l’eau est capable de retenir les gaz et inversement. Une eau froide contiendra donc en valeur absolue, plus de molécules d’O², qu’une eau chaude, et réciproquement. Cette teneur maximale d’O² est ce que l’on appelle la valeur à saturation.
La courbe de température :
Les trois séries de valeurs mesurées ci-dessus représentent, en jaune, la température l’axe des ordonnées (verticale) est commun avec celui des teneurs en O² dissout. Les valeurs sont comprises entre 13°C de 6h00 à10 h00 et 16°C en valeur maximale. Il est également intéressant de noter la décroissance graduelle de la température à partir de 18 h00 le vendredi et l’augmentation rapide de 10h00 à 13h00 le samedi.
La courbe des valeurs d’oxygène dissout :
Il s’agit de la courbe bleue, les valeurs de l’oxygène dissout varient dans une fourchette allant de 3 mg/l la nuit à 8 mg/l en journée. L’effet de la photosynthèse la journée et de la respiration des plantes et des algues la nuit est manifeste. On notera également un palier nocturne à 3 mg/l pour la période allant de 4h00 à 10h00 pour lequel les valeurs n’évoluent plus, la réoxygénation de l’eau s’effectue sans doute via la chute d’eau après le filtre.
La courbe d’oxygène dissout ramenée à sa valeur à saturation :
Cette courbe (rouge) nous indique le pourcentage de l’oxygène dissout dans l’eau par rapport à la valeur théorique à une température donnée. Ce paramètre nous renseigne donc sur la production et la consommation d’oxygène par les êtres vivants.
Pendant les épisodes où la photosynthèse est la réaction dominante (bon ensoleillement), les plantes et algues (il en reste quelques unes) le pourcentage d’oxygène est quasiment à 70 %, la photosynthèse joue donc pleinement son rôle, le myriophylle et les plantains (alisma) captent le CO² de l’eau et le transforme en oxygène.
La nuit, en revanche, en l’absence de rayonnement solaire, le taux par rapport à la saturation chute brusquement, l’explication est qu’il n’y a plus de production d’O² par les végétaux, alors que les animaux (bactéries et poissons) continuent de consommer de l’oxygène.
De plus, pour les végétaux, la réaction s’inverse, ils consomment de l’oxygène en rejetant du CO².
Toutefois, si l’on envisage une production d’oxygène nulle alliée à une consommation régulière, l’allure de cette courbe devrait continuer de décroître, avant de remonter brusquement dès que le soleil réapparaît et que la réaction de photosynthèse s’enclenche.
Or, ce n’est pas le cas ; cette courbe, à température constante rencontre le même palier que la courbe des valeurs absolues, en cause, probablement la cascade qui permet une réoxygénation naturelle de l’eau du bassin.
Il apparaît donc clairement au vu de ces différents résultats que la quantité d’oxygène disponible pour nos poissons est le résultat de plusieurs facteurs lesquels agissent les uns par rapport aux autres. Les facteurs mesurés ici sont des mécanismes primordiaux mais ne sont pas hélas exhaustifs.
L’impact le plus prononcé est celui de la photosynthèse, lequel va avoir tendance à rééquilibrer vers le haut la fourniture naturelle en oxygène apportée dans de l’eau courante.
Le pH dans tout ça ????
On a dit plus haut qu’il était inutile de s’inquiéter dans le cas d’une mesure de pH très élevée. La courbe ci-dessous présente les valeurs obtenues pour le pH et reprend celles de l’oxygène dissout.
Conclusion :
Au travers de ces différents résultats, on observe que les paramètres que l’on peut mesurer ponctuellement dans notre bassin sont trop partiels pour en tirer de quelconques conclusions, d’autant que l’on vient de voir ci-dessus que tous ces paramètres sont intimement interdépendants et fluctuent dans le temps et en fonction des variables d’environnement.
En aparté, je rappelle que le pH et la température de l’eau ont des impacts directs sur l’équilibre calco-carbonique de l’eau et que ceux-ci vont donc aussi influencer la qualité physico-chimique de l’eau du bassin,….Mais ceci est une autre histoire.
Il ne faut donc pas voir un écosystème comme une somme de paramètres physico-chimiques ou biologiques, mais bien comme un tout, il représente un être vivant à lui tout seul. C’est un système complexe formé par des parties minérales et des parties biologiques qui interagissent pour former un équilibre, lequel se déplace en fonction des contraintes de son environnement. Ca ne vous rappelle pas quelque chose ?
Un petit conseil et j’en finirai là : Imaginons . Que je veuille mettre un régulateur de pH, un acide quelconque ou autre traitement miracle. Je n’ai aucune idée de l’impact que cela va avoir sur la globalité de l’écosystème. Pour prendre une image, c’est un peu comme si j’ingérai un médicament sans avoir de posologie précise ni de contre-indications. Alors soyons prudents, et tâchons d’être attentifs à nos plantes et à nos poissons qui sont ceux qui nous renseignent le mieux sur l’état de notre eau.