Autrefois les mares étaient plus nombreuses, d’origine artificielle, les agriculteurs profitaient de la présence d’une zone humide pour aménager un abreuvoir pour les bêtes, une réserve d’eau… De nos jours, beaucoup de ces mares devenues naturelles avec le temps disparaissent (pollution, assèchement, comblement…). Vouloir créer chez soi une mare, c’est partir à la découverte d’un monde » sauvage » passionnant qui enchante toute la famille.
Qu’est-ce qu’une mare ?
Une mare est une petite étendue d’eau (moins de 2000m2), et elle est peu profonde (moins de 2m). Il arrive qu’une mare s’assèche une partie de l’année (on parle alors de mare temporaire), la mare peut être naturelle ou artificielle.
Riche en faune et en flore, elle abrite un écosystème unique.
L’histoire des mares : Pour leurs propres besoins, la plupart des mares ont été construites par les hommes. Ils y puisaient de l’eau pour boire ou cuisiner. Les canards étaient élevés dans les mares, le bétail y était abreuvé et ils servaient également de réservoir à feu. Les étangs étaient omniprésents dans les activités humaines. Pendant de nombreuses années, chaque village avait son propre étang.
La mare est un milieu riche et vivant :
Grenouilles, poules d’eau, salamandres, tritons, nénuphars, iris, joncs….De nombreuses espèces vivent dans l’écosystème de cette mare. Les enfants qui l’observent, et les adultes qui le contemplent trouvent dans l’étang une ressource inestimable. Mais également fragile est menacé… Aujourd’hui, les mares ne sont plus utiles et beaucoup ont disparu avec les plantes et les animaux qu’elles attiraient autrefois. Nous les comblons, les polluons et les oublions. Pourtant, rien n’est perdu, nous pouvons encore faire quelque chose pour stopper cette disparition.
Comment créer une mare ?
La réalisation technique d’une mare est presque identique à la réalisation d’un bassin classique pour koï ou poissons d’ornement, sinon que la mare est moins profonde (moins d’un mètre), afin de permettre une bonne colonisation par les végétaux aquatiques (photosynthèse). Les plantes recouvrent une grande partie de la surface. Un système de filtration classique est souvent déconseillé (aspiration dans le filtre des larves, insectes, plancton…), on évitera d’introduire des poissons (1 poisson par m³ d’eau). Les Koï et les carnassiers (perches…) seront à proscrire, il faudra plutôt se tourner vers des espèces omnivores sauvages : bouvières, épinoches, goujons, carassins si la taille du bassin le permet.
Si l’on souhaite quand même installer une circulation d’eau, une filtration biologique, il faudra isoler la pompe dans une caisse recouverte de grillage plastique très fin. De cette façon, l’aspiration sera répartie sur une plus grande surface et les animaux ne se retrouveront pas collés sur la crépine de la pompe. Il est tout à fait judicieux de réaliser un lagunage planté qui permettra une bonne épuration de l’eau.
Il existe dans le commerce des lagunes prêtes à poser (sorte de bassins préformés équipés). L’eau est répartie uniformément sur le fond de la lagune au moyen d’un drain ce qui évite les zones sans circulation d’eau (et sans oxygène). Il faut les remplir avec de la pierre de lave en granulométrie décroissante : de gros blocs de 10/15 cm jusqu’à une taille de 10/15 mm.
Implantation de la mare et surface
La mare naturelle doit être implantée dans un endroit ensoleillé et dégagé, ce qui favorisera d’une part le développement de la vie et limitera d’autre part l’envasement rapide par les feuilles à l’automne. La lumière et la chaleur sont indispensables à un développement correct de la flore aquatique ce qui permettra la venue et l’observation d’une faune diversifiée.
La surface de la mare variera entre 4 et 30 m² ce qui permettra d’attirer toute une faune de batraciens, insectes… Il ne faut pas se dire qu’une petite mare ne servira pas à grand-chose, en effet, dès les premières heures, l’été, le bassin est colonisé par des insectes aquatiques.
Terrassement et choix de l’étanchéité
Le terrassement comporte 4 paliers :
- Palier 1 : 10 à 20 cm
- Palier 2 : 30 à 40 cm
- Palier 3 : 50 à 60cm
- Palier 4 : 80 à 120 cm
L’étanchéité peut être réalisée en argile (par exemple en cas de rénovation d’une mare ancienne existante) lorsque le terrain s’y prête naturellement. Rien ne sert de vouloir faire à tout prix une mare naturelle en argile sous prétexte que les autres produits sont artificiels. Un terrain sec, pierreux est incompatible avec une mare en argile.
Il existe maintenant des bâches compatibles avec la faune et l’environnement : bâches en E.P.D.M. (Pondliner) par exemple qui ne sont pas en opposition avec le côté écologique de la mare naturelle. Mieux vaut avoir une mare étanchée avec un liner en EPDM et offrant de l’eau toute l’année à ses pensionnaires, qu’une mare sèche du printemps à la fin de l’automne.
La mise en place de la bâche se fera une fois que le terrassement sera terminé. Veiller à retirer tout objet coupant, pierre anguleuse… pour éviter d’accrocher ou de perforer la bâche. Les accrocs se réparent avec des produits spécifiques que vous trouverez chez votre spécialiste.
Les plantes importantes pour une mare
Les plantes qui ont un rôle important dans l’épuration sont les suivantes :
- iris pseudacorus
- glyceria aquatica
- sagittaires (déphosphatant)
- menthe aquatique
- phragmites australis variegata (leur feuillage vert et jaune leur confère un grand attrait visuel et cette variété est moins envahissante que l’espèce type)
- ranunculus flammula et lingua,
- typha latifolia
- gracilis.
Afin d’être efficace, l’eau doit passer lentement à travers la lagune, prévoir une pompe ayant un débit horaire correspondant à 1/5 du volume du bassin (pompe de 1 m³/h pour un bassin de 5 m³).
Il faut laisser aux plantes le temps de s’implanter, environ 2 à 3 ans pour avoir un rendu final intéressant. Après il faudra veiller a entretenir la végétation et éviter qu’elle ne devienne trop envahissante (faucardage). C’est pour cela que le choix des espèces est particulièrement important selon la taille de votre bassin. Vous pourrez vous inspirer de mes remarques notées sur les pages des plantations et préférer les espèces présentes dans votre région.
Palliers
Les paliers seront plus nombreux afin de permettre l’introduction d’une flore plus diversifiée. Une grande partie du pourtour du bassin sera réalisée en zone de marais. Les pentes seront douces afin de permettre le déplacement des amphibiens et de permettre à un animal tombé accidentellement dans le bassin d’en ressortir sans s’épuiser.
Les abords du bassin seront réalisés de manière à ce qu’ils offrent le maximum de refuges aux animaux :
- Murets ou tas de pierres sèches,
- Souches, piles de bois,
- Rangées, tas de tuiles
- Prairie naturelle (fleurs sauvages), haie sauvage (présence d’arbustes d’ornement mêlés à des arbustes tels que le cornouiller, le fusain, le sureau, le noisetier, l’aubépine, l’églantier… )
Exemple d’abri en pierres sèches pour la faune sauvage
Des passages à travers la végétation seront créés afin de permettre un accès facile aux animaux : avancée stable en pierre ou en bois, petites plages pour le bain des oiseaux (3 à 6 cm d’eau)…
La vie dans la mare
La vie dans le bassin s’organise rapidement et au bout d’une saison vous devriez avoir un équilibre du biotope tant sur le plan biologique (qualité de l’eau) que sur le plan de la chaîne alimentaire (colonisation par tous les petits animaux de la mare). Il est évident que l’on s’abstiendra d’utiliser des produits chimiques (engrais, pesticides, insecticides,… ) à proximité du jardin, et que l’on s’interdira tout traitement de l’eau (algicide par exemple). La présence d’une grande zone de marais réalisée avec de la pierre de lave, permettra de maintenir une activité biologique (bactérie) sans filtration et ce toute l’année.
Les animaux viendront d’eux-mêmes coloniser ce nouvel espace s’il leur convient. Grenouilles, crapauds, tritons, salamandres, viendront pondre dans le bassin au printemps et resteront à proximité de l’eau tout le reste de l’année. Les insectes arriveront par les airs : libellules (odonates), dytiques (coléoptères), gerris, ranatres (hétéroptères), éphémères, perles… Les escargots pourront être introduits en même temps que des plantes (pontes collées sur les feuilles).
Au-delà du bassin, il peut être prévu une mangeoire pour les oiseaux, l’hiver, des nichoirs à installer en février (exposition à l’Est) sur les arbres à proximité, pour les mésanges, les bergeronnettes, les rouges-gorges, les rouges-queues, les merles et grives… on peut même installer des abris à crapaud (pot de fleur retourné), à hérisson (friand de fruits sucrés et de croquettes pour chat)… bref au-delà du bassin qui représente déjà à lui tout seul un grand intérêt écologique, c’est l’arrivée de tout un monde animal (et végétal) qui va vivre et se laisser observer pour le plus grand plaisir des enfants et des adultes.
Derniers conseils et facteurs de réussite pour une mare
Les deux facteurs qui comptent dans la réussite du projet sont la profondeur et les berges de la mare. Les rives seront en pente douce sur au moins les 2/3 de la superficie du bassin ce qui permettra :
- L’implantation d’une flore variée (plantes de rives, aquatiques de différentes zones…) ;
- Une entrée et sortie faciles des animaux aquatiques et de ceux tombés accidentellement ;
- Une meilleure tenue des rives face aux pressions de la glace l’hiver.
Une zone profonde d’au moins 80 cm permettra de mettre à l’abri du froid les pensionnaires hivernant au fond du bassin. La rive exposée au Sud sera en pente douce pour permettre notamment des bains de soleil aux amphibiens, la rive exposée au Nord pourra, elle, être plus abrupte.
Pour offrir des refuges aux animaux, je conseille d’installer des tas de pierres à proximité du bassin, voir à cheval entre les parties humide et sèche de la berge. Il est inutile de mettre du sable, de la terre… au fond du bassin pour recouvrir la bâche. Les déchets végétaux fourniront rapidement des sédiments et des éléments nutritifs qui seront assimilés par les plantes.
L’apport de terreau favorise l’eutrophisation de la mare, la prolifération d’algues filamenteuses et se révèle donc néfaste à moyen terme pour l’équilibre du bassin.
Les berges seront conçues comme pour un bassin classique ( réalisation des berges ) il faudra diversifier les matériaux utilisés, zones de marécage, pierres et galets, souches… afin d’offrir le maximum de refuges aux différentes espèces.
Les plantations seront réalisées avec soin ( conseils techniques ) et l’on utilisera uniquement des espèces locales. Pour vous approvisionner vous pouvez contacter d’autres passionnés pour des échanges ou des dons de boutures, graines. Les plantes aquatiques sont prolifiques et faciles d’entretien. La meilleure période pour végétaliser votre plan d’eau va d’avril à juillet.
Il faudra ensuite attendre un peu pour que l’équilibre biologique se fasse ( explications ). Un bassin n’est réellement équilibré qu’au cours de sa seconde année d’existence, alors soyez patient et ne mettez aucun produit chimique (anti-algues) dans l’eau de la mare.
Les animaux sauvages viendront coloniser ce nouvel espace par eux-mêmes. Ne cherchez pas à en introduire à l’exception de quelques limnées et planorbes. Elles pourront aussi être apportées de façon inaperçue sous forme d’œufs avec les plantes aquatiques.